Si depuis plus d'un an, certaines similitudes subsistent entre les différentes politiques monétaires conventionnelles ou non conventionnelles, l'évolution de l'activité économique nécessite une grille d'étude des conjonctures économiques plus poussées. Si les politiques monétaires chinoises et américaines représentent des discussions toujours quotidiennes (comme les récentes annonces sur le fait que la Chine détiendrait beaucoup plus d'emprunts d'Etat Américain que prévu), nous allons davantage comparés les politiques européennes et américaines à celles menées dans les pays émergents.
Jusqu'à présent, on pouvait regrouper la Politique Américaine et celles des pays Emergents sous le sigle des politiques "non conventionnelles" ou Easy Quantitative. A l'opposé la BCE menait une politique conventionnelle en gardant comme prioritaire son objectif de stabilité des prix. L'objectif américain était de relancer sa demande domestique. Le schéma est relativement simple: la FED achète un volume important d'obligations du Trésor sur le long terme ce qui incite ses anciens détenteurs à convertir leurs positions vers les actifs risqués (actions). Ainsi les marchés d'actions auraient augmentés de 15% depuis les dernières mesures d'Easy Quantitative provoquant une baisse du taux d'épargne américain. Pour les ménages américains la propension à convertir les plus-values tirées des marchés financiers en dépenses de consommation est d'environ 4%, ce qui représente, par agrégation, une hausse de 100 milliards de dollars. Cette hausse s'est illustrée par les derniers chiffres du PIB du 4ème trimestre américain en hausse de 3,2% alors que les consommations personnelles augmentaient de 4,4% et le taux d'épargne diminuait au niveau de 5,3%. L'enjeu est de savoir si ce système est durable et peut tenir encore plusieurs mois.
Cependant ces mesures non conventionnelles sont aujourd'hui critiquées en particulier parcqu’elles alimenteraient un taux d'intérêt réel négatif (le taux d'intérêt nominal diminué du taux d'inflation). L'inflation qui sert d'indicateur est celle dite "sous jacente" c'est-à-dire celles n'incluant pas l'évolution du prix de l'alimentation et de l'énergie. En somme deux pans de l'évolution des prix qui ont été particulièrement importants ces derniers mois (la demande d'alimentation étant supérieures à l'offre et l'évolution des prix énergétiques s'illustrant par la valorisation des actifs liés sur les marchés financiers - à l'image du pétrole). En somme, non seulement les taux d'intérêts réels sont faibles voire négatifs mais ils resteraient sous-valorisés. Le Royaume-Uni connaitrait par exemple une inflation de 3,3% tandis que son taux directeur est de 0,5% soit un taux d'intérêt réel de -2,8%. La marge est donc importante pour relever ces niveaux de taux. Abandonner les mesures d'après-crise pour coller à la conjoncture du moment et aux tensions inflationnistes. Une transition qui nécessite de temporiser.
Du côté de la BCE la politique n'est que plus conventionnelle. Certes les taux d'intérêt réels restent aussi négatifs (il faudrait doubler le taux directeur actuel) mais la politique est légèrement différente puisqu'il s'agit pour la FED d'agir sur la demande au moyen des marchés financiers tandis que la BCE cherche la stabilité des prix en relevant ses taux d'intérêts à court terme. A contrario, les problèmes de soutenabilité des finances publiques ont amené l'institution européenne a mener des programmes d'achat de dettes et à maintenir une surliquidité dans sa zone ce qui provoque une baisse des taux d'intérêt. En bref la BCE est entre deux leviers, l'un pour augmenter le taux d'intérêt, l'autre pour le diminuer. Il serait difficile mais intéressant de mener des études quantitatives pour évaluer le degré de compensation d'une politique vis-à-vis de l'autre. Mais très clairement la BCE garde une position rigide vis-à-vis de sa mission de stabilité des prix qui la différencie d'une politique américaine alors même que les conjonctures et les marchés d'actifs connaissent une évolution relativement similaire.
Les pays émergents connaissent certaines difficultés en ce début d'année, plus liées à leur forte attractivité en 2010 qu'autre chose. Les marchés financiers ont soufferts de leur forte valorisation annuelle tandis que les indicateurs américains (confiance des ménages, des investisseurs, hausse des dépenses) ont conduit à une prise des bénéfices ces dernières semaines. Globalement ces marchés connaissent une phase de correction mais gardent une tendance long-termiste qui devrait reprendre sous 2-3 mois, d'autant plus que les valorisations actuelles étant historiquement faibles, la baisse potentielle de ces marchés restent limitées. L'enjeu pour ces pays se porte surtout sur les tensions inflationnistes qui sont autant le résultat des mesures non conventionnelles menées depuis 6 mois qu’une conséquence de l'arbitrage, en terme de gestion d'actifs financiers, mené suite à une reprise significative de l'activité américaine.
Il est toujours intéressant de suivre, analyser et dégager les tendances des politiques monétaires comme budgétaires vis-à-vis de l'évolution des marchés. Plus que jamais, les acteurs se multiplient tandis que les conjonctures et les politiques monétaires se diversifient, rendant toujours plus compliquée une méthode de coordination entre les pays.
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