Le gouvernement allemand a adopté le 25 août 2010 un projet de taxe sur les bénéfices des banques. Pourtant décriée, cette initiative illustre l'apport de l'économie théorique aux institutions soucieuses de se stabiliser.
La mise en place de la BCE comme une autorité indépendante avait déjà récompensé les efforts de Kydland et Prescott (1977). Ces derniers avaient mis en évidence l'incohérence temporelle des politiques monétaires (une politique de faible inflation peut être rapidement suivie d'un politique inflationniste). Une première avancée soutenue par l'Allemagne pour le projet de la zone euro.
Le succès de la politique monétaire européenne face à la crise financière de 2007, a soulevé les lacunes des politiques budgétaires des différents états membres. Des problèmes structurels, anticipés et qui ont éclaté ces derniers mois avec des pays comme la Grèce ou le Portugal. Ces difficultés restent très liées aux soutiens des gouvernements à l'attention des grands leaders bancaires. En somme, la politique monétaire a atténué la crise macroéconomique tandis que les gouvernements ont évité les crises microéconomiques par le sauvetage de plusieurs banques.
L'initiative allemande s'avère être un moyen d'éviter des paniques bancaires. Trois solutions sont proposées par la littérature économique. La première est celle du narrow banking qui force les intermédiaires financières à disposer de fond suffisant pour rembourser les déposants en cas de crise. La seconde approche a été proposée par Diamond et Dybvig en 1983 et consiste à instaurer un système public d'assurance de dépôts financé par une cotisation sur l'ensemble des dépôts. Une troisième et dernière proposition est celle du prêteur en dernier ressort source d'aléa moral. Des aléas qui se sont multipliés en 2008 et 2009 où des Etats ont recapitalisé de nombreuses institutions bancaires. En somme si la troisième proposition a déjà été "adoptée", la seconde est d'actualité.
L'Allemagne n'impose pas une cotisation à chaque déposant, en revanche la "taxe bancaire" s'applique aux intermédiaires financiers dans une limite de 15% de leur bénéfice net. Certes Il persiste un incitation à la prise de risque, puisque certaines banques seront sauvées en cas de nouvelles crises, mais l'allocation de ce fond à quelques institutions bancaires en difficultés peut en exclure d'autres, d'où une prise de risque limitée.En outre, la constitution de ce fond engage les entreprises à augmenter leurs fonds propres et à diversifier leurs activités.
Deux enjeux restent à venir. Le premier est d'élargir cette politique à l'ensemble de l'Union Européenne. Cette idée n'est pas seulement souhaitable pour chaque pays pris distinctement (la France soutient l'initiative), elle ouvre des perspectives pour une gouvernance européenne autant monétaire que budgétaire en facilitant une homogénéisation de la compétitivité des acteurs financiers en zone euro. La mise en place d'une nouvelle autorité indépendante en charge d'un fond européen renforcerait la crédibilité de la Banque Centrale Européenne.
Un second enjeu serait d'élaborer une grille d'évaluation des établissements bancaires susceptibles de pouvoir profiter de ces taxes bancaires. Déterminer des ratios d'endettement comme de capitalisation constituerait une première étape pour inciter les institutions à renforcer leurs bilans. La taxe bancaire ne servirait plus seulement à limiter l'utilisation du budget public alimenté par les contribuables. Mieux la taxe encouragerait les institutions financières à adopter des stratégies de croissance durable et donc indirectement à limiter les risques de nouvelles crises systémiques, en accord avec de nouvelles règles prudentielles.
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